09 janvier 2023 Liberthèmes

Ecce homo, le récent roman de Gérard Mordillat est une histoire d'amour étalée sur plusieurs siècles entre Lucie, Henri et Thomas. Ils s'étreignent ou s'affrontent au XIVème siècle en Champagne pendant la Grande Peste, au XIXème siècle dans le nord de l'Italie pendant la répression des luttes ouvrières, au XXIème siècle aux États-Unis pendant la non-réélection de Trump. Le pouvoir et l'argent y jouent un rôle essentiel, notamment dans le combat pour conquérir un quatrième personnage, un linceul dont on suit la fabrication, l'exposition et l'exploitation. Sont racontées ses aventures successives lorsqu'il est peint, photographié, filmé. Mais son image - une image est-elle la vérité ? - est utilisée pour en faire le « Saint-Suaire » ayant contenu le corps du Christ.
« Je m'intéresse à l'Histoire, à la littérature, au cinéma », ces paroles de Lucy définissent bien la démarche de Gérard Mordillat dans ce livre, nourri de longs travaux réalisés avec Jérôme Prieur.

L'Histoire est également bien présente dans La Guerre des paysans, B.D. dont il a écrit le scénario illustré par le dessinateur Éric Liberge.
Au seizième siècle en Allemagne, le théologien Martin Luther engage un combat pour la Réforme de l'Église catholique, bien assise sur ses privilèges et ses messes en latin. Il est rejoint par Thomas Münzer, moine proche des paysans. Ceux-ci, accablés par la misère, interprètent les thèses de Luther, diffusées en allemand, comme un appel à se réapproprier les biens de l'Église et des seigneurs qui les exploitent : ils pillent les monastères, libèrent les nonnes et incendient les châteaux. Mais Luther, voulant en rester à une querelle théologique, prend le parti des princes allemands, alors que Münzer rappelle que champs, bois et rivières sont des biens communs. Dans cette guerre de dizaines de milliers de paysans contre riches et possédants, l'armée sortira vainqueur.
Münzer, avant d'être pendu, déclare à son bourreau : « Omnia sunt communia ».

On peut aussi voir en ce moment les quatre épisodes de la série documentaire que Gérard Mordillat a réalisée pour Arte, avec Christophe Clerc et Bernard Rothé : « Inviolable et sacrée », « Mon corps est à moi », « Breveter le vivant », « Posséder la terre ».