Depuis 2019, Rockwool, leader mondial de l'isolation en laine de roche veut imposer la construction d'une usine aux 1870 habitants de Courmelles, dans l'Aisne. Son maire agriculteur, Arnaud Svercek, coordonne avec les associations "STOP Rockwoool" et "Sauvons Soissons" un long combat qu'il décrit dans le livre Le village contre la multinationale.
Appuyée par la majorité des élus (Soissons, agglomération intercommunale, région) et par le préfet, la multinationale, faisant miroiter la création de quelques emplois dans cette région au chômage important, pensait obtenir facilement le permis de construire de la commune : "J'ai vu la force de frappe de l'industriel et de l'agglomération. À leurs yeux je ne suis qu'un pion dont on attend une signature".
Une enquête publique organisée mi-octobre 2020 est l'occasion pour les opposants de s'informer sur les dangers de cette usine, grande consommatrice d'eau et d'électricité, qui devrait s'installer sur 39 hectares du Plateau. Les vents dominants dirigeraient les fumées s'élevant des 5 cheminées vers la cuvette de Soissons, à quelques kilomètres. Elles contiennent 28 substances, certaines cancérogènes, pouvant provoquer des maladies cardio-vasculaires et pulmonaires ; plusieurs sont des perturbateurs endocriniens agissant sans seuil de dangerosité. Le procédé consiste à injecter dans un four à 1500 °C des minéraux (basalte, dolomite), dont la lave est transformée en fibres avec un liant chimique très polluant. Il est aujourd'hui dépassé par l'utilisation d'isolants biosourcés (chanvre, lin...) n'utilisant pas de produits chimiques.
La consultation avec une forte participation donne 80 % d'oppositions. Cette réponse défavorable est confirmée par le commissaire enquêteur et conduit le maire à refuser le permis de construire le ler mars 2021. Rockwool et le préfet déposent alors un recours et une longue bataille juridique est engagée. Les pressions sur le maire se multiplient, menaçant notamment la commune de lourds dommages et intérêts. Les opposants au projet s'organisent, informent, manifestent : "Se développe le mouvement social d'un village qui s'élève contre les intérêts d'une multinationale et la destruction d'un territoire. C'est une graine de révolte qui va germer". Cela va peser sur la décision de la cour administrative d'appel qui, le 5 juillet 2024, confirme l'annulation du permis de construire.
Arnaud Svrcek, notre invité, qui rappelle que "les seuls combats perdus d'avance sont ceux qu'on ne mène pas", a acquis une conviction forte :
"C'est la leçon de cette histoire pour moi : la base doit faire bouger les choses. le changement passera par de nouvelles formes de démocratie locale participative".
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