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    Emissions des dernières semaines :

    11 novembre 2024 Liberthèmes

    "Il a été le peintre d'une époque. Son œuvre, c'est soixante ans de chroniques de la société française". Ces paroles ont été prononcées par Stanislas Nordey, fils de Jean-Pierre Mocky, à l'occasion de son enterrement le 12 août 2019.
    Réalisateur, scénariste, adaptateur, monteur, acteur, producteur, distributeur, ce franc-tireur, cet enragé, ce bouillonnant, a notamment à son actif, en soixante-quinze ans d'activités, plus de soixante longs-métrages, dont plusieurs films-culte, et quarante épisodes de séries pour la télévision.
    Cela méritait bien le livre de référence Jean-Pierre Mocky que vient de publier aux "Éditions Rouge profond" Éric le Roy, historien du cinéma, qui fut son assistant au début des années 1980 : il dédie son livre à "Jean-Pierre Mocky pour son amitié fidèle. J'ai eu la chance de croiser son chemin. Il a changé le cours de ma vie".
    Agrémenté de nombreuses images, scènes de film, affiches, portraits de Mocky à diverses époques,
    cet ouvrage s'appuie sur des témoignages de collaborateurs techniciens ou acteurs du "Mocky Circus", de documents parfois inédits, permettant de partager les passions de ce créateur-artisan, amoureux de la vie et du cinéma, qui a toujours su rester indépendant.

    Il s'est intéressé à tous les genres :
    la comédie avec Un drôle de paroissien, Les Compagnons de la marguerite, La Grande Lessive (!),
    le drame avec Un couple, Le Témoin, Y a-t-il un Français dans la salle ?,
    le polar avec Solo, Un linceul n'a pas de poche, Noir comme le souvenir.
    Prenant le contre-pied de la mode, il utilise la farce, la satire, le grotesque. Il explique ses provocations : "C'est pour faire réagir. Je ne puis supporter la société telle qu'elle est aujourd'hui. Mes films sont la manifestation de ce dégoût, mais je ne crois pas être misanthrope. J'aime les vrais humains, ceux qui ne piétinent pas leur dignité".
    Les cibles récurrentes de celui que certains appelleront l'anartiste : Église, État, politiciens, police, argent, hypocrisie, auxquels s'opposent des héros solitaires, marginaux, romantiques dont le destin est le plus souvent tragique.
    Éric Le Roy montre à travers ses films et sa vie que "Mocky perçoit que la société est pourrie. Il le vit comme un malaise et s'en révolte. Les opprimés, les délaissés, les oubliés existent dans son cinéma, avec humour et insolence. Il rêve d'un monde meilleur, de liberté, d'améliorer la vie, de changer la société".

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    04 novembre 2024 Luttes sociales

    La musique africaine-américaine prend ses racines dans l'esclavage : en 300 ans plus de 11 millions d'Africains ont été ramenés de force dans le Deep South des États-Unis pour servir de main d'œuvre corvéable à merci pour les grands propriétaires de champs de coton. Les chants, les danses, les joutes verbales jouèrent un rôle essentiel pour supporter les souffrances et renforcer les liens communautaires entre ces déportés de différents peuples d'Afrique de l'Ouest.
    Dans un pays qui se présentait comme celui de la liberté et de l'égalité, les conditions de travail et de vie abominables imposées à ces humains (ségrégation, lynchages) afin de devenir la nation la plus riche du monde, étaient justifiées par les exploiteurs blancs en prétendant appartenir à une race supérieure : encore aujourd'hui "Indios" et "niggers" sont des injures crachées au visage de sous-hommes "menaçant la pureté de la race".
    Lutter en chantant les "work songs" leur a permis de dénoncer les injustices, de construire un rempart contre l'aliénation. Mais qu'est-ce que le jazz ? :
    "Un noir était jazz dans tout ce qu'il faisait", Nina Simone, pianiste et chanteuse.
    "Le jazz est l'éternel tam-tam qui résonne dans l'âme noire, le tam-tam de la révolte contre la lassitude de vivre dans un monde blanc", Langston Hugues, poète.
    Pour l'industrie américaine du spectacle, le jazz était avant tout un produit commercial de divertissement permettant de faire des profits. Certains musiciens blancs ont tenté de le copier en éliminant son contenu social. Mais cette musique, en perpétuelle évolution depuis les zones rurales pauvres du sud et les ghettos noirs des villes industrielles, a su rendre sa dignité au prolétariat noir.

    Le son de la révolte (Éditions Le mot et le reste) est un récent livre référence qui retrace l'histoire des États-Unis à l'aune des musiques africaines-américaines. Nous recevons Christophe Ylla-Somers, son auteur, qui anime l'émission Soul Power sur Radio Libertaire :
    "Le blues, la soul, le jazz ou le hip-hop expriment avant tout l’aspiration à un changement social".

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    28 octobre 2024 Tranches de vie

    "Comédien, syndicaliste et formateur, tel fut le triptyque de ma vie" est la dernière phrase du livre de Serge Vincent : Itinéraire d'un artiste citoyen (Éditions L’Harmattan).

    À l'age de 21 ans, désirant devenir artiste, il quitte Montpellier pour Paris, un "saut dans l'inconnu". Commence alors pour lui une vie d'intermittent du spectacle, avec des petits rôles au théâtre, cinéma, séries TV, spots publicitaires. Dans le bistro-épicerie de "La mère Vernet" à Montmartre, le café de Dédé "Le petit Gavroche"dans le Marais, "le couloir de la honte" des studios des Buttes Chaumont, ses diverses rencontres lui permettent de trouver des emplois dans divers domaines : opéra en occitan, doublages de film, spectacles de marionnettes, interventions dans les établissements scolaires, cours de formation en expression orale...

    Le tournage d'un téléfilm sur Jean Moulin et l'envie de défendre les intérêts matériels et moraux des artistes-interprètes, le décident à s'engager dans l'action syndicale. Il participe en 1980 à la création du SYDAS-CFDT. Mais, constatant que l'autogestion revendiquée par la CFDT n'était que "du vinaigre pour attirer les mouches" et que Jack Lang, Ministre de la Culture de François Mitterrand, n'avait pour objectif que "de mettre en place une vitrine culturelle à la gloire du régime", il est à l'initiative de la création en 1984 du Syndicat indépendant des artistes-interprètes (SIA), beaucoup plus combatif.
    C'est le début de sa participation à de nombreuses actions, notamment juridiques, pour la reconnaissance de sa représentativité (contesté par le syndicat SFA-CGT majoritaire), et pour obtenir la transparence sur la gestion collective des droits auteurs et des artistes notamment concernant l'ADAMI (Administration des Droits des Artistes et Musiciens Interprètes) et la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique).
    La divulgation par différents médias - dont Radio Libertaire et Le Monde Libertaire - de divers scandales en ce domaine, alimentée par le SIA, par l'association "Protection des ayants droits" qu'il a créée en 1993, et par son livre Les dessous de la loi Lang, lui vaut trois procès en diffamation, les pressions des gouvernements de gauche et de droite, les imprécations du SFA-CGT.
    Après des années de recours juridiques, de rapports ministériels enterrés, de décrets gouvernementaux contestés, de pressions multiples, la loi du 1er août 2000 met en place une commission de contrôle sur les comptes des sociétés incriminées.

    Il a aussi passé à l’Université une capacité en droit en deux ans, bien utile face aux juges, et pris pour le plaisir des cours de chant avec Armande Altaï.
    Aujourd'hui, Serge Vincent est "retraité mais actif".

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